La belle irlandaise
Don Juan
Gloire à qui freine à mort, de peur d'écrabouiller
Le hérisson perdu, le crapaud fourvoyé
Et gloire à don Juan, d'avoir un jour souri
A celle à qui les autres n'attachaient aucun prix
Cette fille est trop vilaine, il me la faut
Gloire au flic qui barrait le passage aux autos
Pour laisser traverser les chats de Léautaud
Et gloire à don Juan d'avoir pris rendez-vous
Avec la délaissée, que l'amour désavoue
Cette fille est trop vilaine, il me la faut
Gloire au premier venu qui passe et qui se tait
Quand la canaille crie haro sur le baudet
Et gloire à don Juan pour ses galants discours
A celle à qui les autres faisaient jamais la cour
Cette fille est trop vilaine, il me la faut
Et gloire à ce curé sauvant son ennemi
Lors du massacre de la Saint-Barthélémy
Et gloire à don Juan qui couvrit de baisers
La fille que les autres refusaient d'embrasser
Cette fille est trop vilaine, il me la faut
Et gloire à ce soldat qui jeta son fusil
Plutôt que d'achever l'otage à sa merci
Et gloire à don Juan d'avoir osé trousser
Celle dont le jupon restait toujours baissé
Cette fille est trop vilaine, il me la faut
Gloire à la bonne sœur qui, par temps pas très chaud
Dégela dans sa main le pénis du manchot
Et gloire à don Juan qui fit reluire un soir
Ce cul déshérité ne sachant que s'asseoir
Cette fille est trop vilaine, il me la faut
Gloire à qui n'ayant pas d'idéal sacro-saint
Se borne à ne pas trop emmerder ses voisins
Et gloire à don Juan qui rendit femme celle
Qui, sans lui, quelle horreur, serait morte pucelle
Cette fille est trop vilaine, il me la faut
Georges Brassens
Gustave Courbet, La belle irlandaise.
À l’époque de la réalisation du tableau, le modèle préféré de Courbet était une jeune femme, Joanna Hiffernan, dite Jo. C’est son amant James Whistler, peintre américain admirateur et disciple de Courbet, qui l’avait prêtée à Courbet.
En 1866 Courbet réalisa un autre tableau, La belle Irlandaise, dont le modèle était Joanna Hiffernan. En tout Courbet réalisa quatre portraits de Jo. Elle fut vraisemblablement le modèle de L’Origine du monde, ce qui expliquerait la brutale séparation entre Courbet et Whistler peu de temps après la réalisation de l’œuvre. Whistler retourna ensuite aux États-Unis laissant un testament en faveur de Jo. Malgré la différence de coloration des cheveux roux de Jo et des poils pubiens plus sombres de L’Origine du monde, l’hypothèse que Jo ait été le modèle de ce dernier prévaut.
Dans J’étais l’origine du monde, publié en 2000 la romancière Christine Orban prend parti en imaginant comment la narratrice, Joanna Hiffernan, fut l’amante de Courbet et le modèle du fameux tableau. Déjà Bernard Teyssèdre, dans Le roman de l’origine 1996 dont le personnage central est le tableau lui-même ("il lui en arrive, des aventures!") avait proposé de voir en Joanna Hiffernan le modèle.
J'ai déjà écris un message sur ce tableau : "L'origine du monde" mais je ne sais plus quand.
Cette touffe sauvage a donc un visage.
Comme l'amour, l'art n'est pas plaisir mais passion.
André Malraux, Les voix du silence.
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